Puisqu’on
en est dans les autres histoires qui ne concernent pas directement
le G.O., en 1901 furent créées de nouvelles Loges d’Adoption
sous l’égide de la Grande Loge de France tout d’abord
sous les hospices de la loge le Libre Examen puis sous les hospices
de l’obédience elle-même.
De 1901 à 1936, 11 Loges d’Adoption seront ainsi constituées
à la Grande Loge de France. Il ne s’agit pas de mixité
mais bien d’une réactivation de l’ancien système
de Loges d’Adoption qui était tombé en désuétude.
Du reste, il est
significatif de relever qu’en 1906, la question à l’étude
des Loges pour le Convent de la GLF est : « Des moyens à
employer pour soustraire la femme à l’influence de l’église
et l’associer à l’action maçonnique. »
Mais le G.O. aussi se pose la question, certains maçons considérant
qu’ils ont « besoin des femmes pour faire de la propagande
auprès des femmes et les détacher du parti de l’église
» (extrait des actes du Congrès Régional
du G.O., Tours, 1908).
Si la création du DH n’a pas suffi à enclencher
un mouvement de fond en faveur de l’initiation féminine
encadrée, la perspective de s’opposer à l’église
et de combattre le cléricalisme est un moteur suffisamment
puissant.
Si le G.O. ne saute pas le pas, la GLF laisse le champ libre à
l’adoption.
Mais là encore, il s’agit d’une autre histoire
qui va conduire après bien des péripéties le
21 octobre 45 (1900) à la 1ère assemblée générale
indépendante de l’Union Maçonnique Féminine
de France qui prendra en 1952 le nom de GLFF, appellation que les
Sœurs s’octroient par un vote en assemblée générale
et par lequel elles deviennent le pendant de l’obédience
dont elles sont issues, la suite relevant là aussi de l’histoire
de la GLF.
A ce jour, en France les principales obédiences ont des positions
différentes concernant la mixité :
Les obédiences suivantes sont masculines et voici quelles sont
leurs positions
à GODF reconnaît la F.'.M.'. féminine et les Loges
sont autorisées à inviter des maçonnes à
leurs tenues
à La Grande Loge de France ne reçoit pas de femmes dans
ses loges mais elle reconnaît la F.'.M.'. féminine
à La Grande Loge Nationale Française est une obédience
masculine régulière et par conséquent ne reconnaît
pas la F.'.M.'. féminine
Les obédiences suivantes sont mixtes et les femmes et les hommes
sont à égalité par rapport à l’initiation
et au parcours maçonnique
à Le Droit Humain
à La Grande Loge Mixte de France
à La Grande Loge Mixte universelle
Enfin certaines obédiences sont exclusivement féminines
mais les maçons sont reçus en tant que visiteurs à
certaines tenues
à La Grande Loge Féminine de France
à La Grande Loge Féminine de Memphis-Misraïm
Ainsi celle ou celui qui souhaite devenir Franc Maçon a donc
le choix
Mais là encore, cela relève d’une autre histoire.
Aujourd’hui
chacun, chacune peut donc faire le choix d’un type de F.'.M.'.
qui lui convient à priori. Homme, Femme, Mixte…Mais il
s’agit là d’une réflexion qui se situe en
dehors de la F.'.M.'. car lorsque l’on est en état de
se la faire, il est déjà trop tard, le choix est fait.
En ce qui me concerne,
le choix m’a amené au GODF et si je ne le regrette absolument
pas ce n’est pas seulement à cause des agapes ( quoique
pour la vaisselle)…
Plus sérieusement, je m’interroge sur la position de
notre obédience par rapport aux femmes, car si les réponses
à la question des femmes sont multiples au sein de l’ensemble
de la F.'.M.'., celle apportée par le GO me semble plus complexe
encore à aborder.
Pas de sœur initiée mais des sœurs visiteuses reconnues
: est-ce là une méthode naturelle de reconnaissance
d’égalité ?
Le nœud du problème me semble être cette question
: pourquoi cette question se pose-t-elle toujours ? Pourquoi existe-t-il
des Loges de Femmes, des loges Mixtes et des Loges Masculines ?
Pourquoi la F.'.M.'. universelle ne parvient-elle pas à dépasser
certains préjugés pour admettre l’universalité
d’une humanité mêlant nécessairement masculin
et féminin ?
Au même titre qu’elle mêle les couleurs, les cultures,
l’homosexualité et l’hétérosexualité,
les générations, etc…
L’universalité est le dépassement de toutes les
différences pour reconnaître avant toute chose l’humanité
de chaque être. Parler des femmes en maçonnerie permet
d’évaluer d’une certaine manière la pérennité
et la validité des grands principes de notre civilisation.
Or celle-ci, comme toute expression humaine n’est pas parfaite,
mieux elle est perfectible. La perfection n’est pas humaine,
sa recherche l’est. Recherche que mènent précisément
les maçons. Aussi le traitement de la question féminine
par la F.'.M.'. est révélateur de la manière
dont notre société s’est construite sur des principes
non universels même s’ils prétendent l’être.
Exemple : les Droits de l’Homme aussi juste soient-ils, n’ont
jamais été les Droits de la Femme.
Les Droits de l’Homme « The Human Rights » en anglais
sont calqués sur un modèle datant du XVIIIème
siècle, époque ayant autorisé les premières
réflexions sur la fin de l’esclavage tout en tardant
à l’abolir et n’ayant jamais cessé d’asservir
les femmes. Aussi, l’on peut penser que l’enjeu ultime
d’une réflexion sur l’initiation des femmes à
l’égal des hommes est la version de l’humanité
qu’elle suppose, pour la F.'.M.'. comme pour le monde qui l’accueille.
Maintenant, l’on peut aussi penser que la mixité du travail
dans les Loges puisse amener un niveau de difficultés ou de
contraintes plus spécifiques, car même lorsque nous entretenons
d’excellents rapports (sans jeu de mot) avec le sexe opposé
(quel qu’il soit), nous naviguons sans cesse entre attraction
et réserve, concession et séduction, entre attirance
et compétition, entre refus, présomptions et astuces.
Alors il est vrai que de temps en temps il n’y a rien de meilleur
que de s’isoler avec des personnes du même sexe !...(pour
travailler bien sûr)
Pour certains
en outre, la non mixité peut être mise en parallèle
avec les travaux qui se déroulent dans les Loges.
Ceux-ci touchant à la personnalité même des participants
qui privilégient l’être sur le paraître et
qui s’évertuent dans un climat empreint de sérénité
à connaître leurs qualités et leurs défauts
sans concession aux convenances de la société profane.
Donc pour certains la mixité ne serait pas propice à
la création et à l’entretien de l’atmosphère
appropriée, dans la mesure où elle pourrait susciter
des attitudes et des comportements individuels incompatibles avec
la recherche personnelle à laquelle s’emploie le maçon
en Loge autant qu’avec le fonctionnement du groupe.
En d’autres
termes, cela ne fait que traduire le fait que finalement les francs
maçons ne sont que des hommes, voire même parfois des
mâles qui auraient du mal en présence de femmes à
mettre de côté leur désir de plaire et de séduire.
Ce type d’argument est intéressant mais outre la moyenne
d’âge certaine au sein de nos loges (mais bien sûr
pas la nôtre…merci B…n…, il devrait conduire
à mettre de côté les homosexuels prêts à
succomber aux charmes de leurs Frères (enfin peut-être
pas tous). Cet argument ne tient donc pas.
Il en est de même que valider l’idée d’une
F.'.M.'. spécifiquement féminine c’est reconnaître
l’existence de la femme en tant qu’être identifié
et surtout différent.
Au mépris du principe d’égalité ?
La plupart des
civilisations, particulièrement en Occident ou dans les confessions
monothéistes, ont établi l’infériorité
du féminin, quand les systèmes philosophiques dits traditionnels
établissent parfois l’idée de complémentarité
entre les deux sexes, tout comme le jour ne saurait exister sans la
nuit, l’été sans l’hiver. La distinction
évidente des identités sexuelles au sein du genre humain
a mené très souvent à des organisations sociales
de type patriarcal.
A tel point que la tradition est aujourd’hui officiellement
rétrograde ; jugement erroné puisqu’il se trompe
de cible.
Il est étonnant de constater à quel point certaines
sociétés primitives sont en avance dans la perception
du statut féminin sur nos sociétés civilisées.
La reconnaissance des droits des femmes a été et est
encore un combat en Occident parce que la civilisation dite moderne
s’est construite sur des valeurs établissant une hiérarchie
de fait entre hommes et femmes.
Le XIXème
siècle, ère de science et du modernisme triomphant a
été le siècle de l’asservissement féminin
le plus caricatural. La femme a dû se libérer dans la
société qui est l’auteur des principes universels
de liberté et d’égalité.
Saisissant paradoxe propre à l’Occident, faisant du combat
pour l’émancipation féminine un combat politique
alors qu’il devrait précisément dépasser
ce stade pour être seulement un principe immuable.
Aujourd’hui
encore, les débats sur la question féminine sont dans
cette dimension politique ; les conséquences en sont importantes
puisque ce confinement justifie en un sens les tergiversations maçonniques.
Fondamentalement
apolitique, la F.'.M.'. est un lieu où au moins depuis le XIXème
siècle, a été permise la rencontre d’hommes
d’horizons différents. La meilleure preuve en est l’adhésion
d’anarchistes (et là je ne cite personne, mais suivez
mon regard…) anarchistes donc qui sont par nature rétifs
à tout ce qui ressemble à une ligne de parti.
Pourtant, le vrai courage serait de reconnaître à cette
question sa qualité apolitique et universelle. La F.'.M.'.
travaille à partir des symboles et l’on peut s’étonner
qu’à côté de la dualité blanc/noir,
les deux couleurs du pavé mosaïque, cette autre dualité
le masculin/féminin, qualité essentielle de l’espèce
humaine, soit évacuée de la majorité des Loges
dans leur composante humaine ;
N’est-ce pas amputer la réflexion ?
En ouvrant leurs loges aux femmes beaucoup de nos Frères craignent
de perdre plus qu’ils ne gagneraient… ?
Mais l’idée d'une F.'.M.'. universelle ne peut pas (ne
doit pas) s’accommoder du fractionnement de la séparation
des sexes.
Autant la séparation de l’église et de l’état
a été un progrès décisif, autant la réunion,
sinon l’accord des hommes et des femmes marquera un progrès
décisif pour notre humanité en souffrance. Car l’humanisme
ne se découpe pas en rondelles. Il n’y a qu’une
seule humanité et du reste lorsque l’on prétend
être universel, il faut s’appliquer ces principes à
soi-même.
Je conçois
très bien que des Frères aient envie de travailler entre
eux, comme nos Sœurs de la GLFF qui n’initient pas les
hommes et travaillent entre elles.
Je pense qu’à terme, il faudra que nous rapprochions
les obédiences.
En attendant ce jour nous avons au GODF la pluralité des rites
et j’espère que nous aurons un jour en notre sein, des
loges masculines, féminines et mixtes.
Ce qui permettra à chacun et chacune de travailler comme il
(elle) le souhaite.
Les hommes et les femmes ont à s’enrichir mutuellement
afin de devenir une femme et un homme accompli, porteur de valeurs
d’humanisme, de respect et d’amour, libres et solidaires
ensemble.
Le 07 mars 2006 (veille de la journée internationale des droits
de la femme et aussi jour de l’anniversaire d’une belle
sœur qui a pris aujourd’hui pile poil 10 ans de plus que
moi…)
J’ai dit.